Afrique du Sud : au moins 72 morts et plus de 750 personnes arrêtées au KwaZulu-Natal dans la région de Jacob Zuma

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Les violences en Afrique du Sud ont coûté la vie à 72 personnes au moins. Ces violences ont débuté vendredi dans la région du KwaZulu-Natal, la région de Jacob Zuma, au lendemain de l’incarcération de ce dernier. Elles ont aussi touché Johannesbourg.

«Les agences des forces de l’ordre redoublent d’efforts pour stopper la violence et accroître leur déploiement sur le terrain», a indiqué ce matin le ministre de la Police Bekhi Kelle lors d’une conférence de presse conjointe avec les différents acteurs de la sécurité sud-africains.

En plus des forces légales déployées dont l’armée, les autorités ont annoncé impliquer des entreprises de sécurité privées. Dans son discours télévisé hier soir, le président Cyril Ramaphosa a souligné le caractère inédit de ces violences depuis l’avènement de la démocratie postapartheid.

750 personnes arrêtées

Par ailleurs, plus de 750 personnes ont été arrêtées dans les provinces du Kwazulu-Natal et de Rauteng. Les enquêtes sont en cours. «Les instigateurs de la violence ne seront pas épargnés», a ajouté le ministre de la Police lors de son intervention. Les 48 prochaines heures sont critiques, assure de son côté Daniel Silke, analyste politique, car les violences pourraient s’étendre à d’autres régions du pays (lire ci-dessous).Durban et Soweto sont particulièrement touchés. Les images de pillages et de violences sont largement partagées encore aujourd’hui sur les réseaux sociaux. On y voit des centres commerciaux éventrés. Et des queues interminables aux pompes à essence et dans les supermarchés épargnés par les mises à sac. Des centaines de pillards ont saccagé des entrepôts industriels dans la banlieue de Durban, qui est l’un des ports maritimes les plus actifs d’Afrique. Une usine chimique de la région a également été incendiée.

De son côté l’agence d’espionnage sud-africaine cherche à savoir si ses propres anciens agents ont orchestré la violence au Kwazulu-Natal par loyauté envers Zuma. Soupçons confirmés par Ayanda Dlodlo, ministre de la Sécurité nationale, lors d’un point de presse mardi.

Pour Daniel Silke, directeur du Political Futures Consultancy, analyste politique spécialiste de l’Afrique du Sud, une combinaison de facteurs explique la poussée de violence que connaît l’Afrique du Sud actuellement.

«Nous avions déjà une économie très faible, et la crise du Covid a ravagé de nombreux secteurs de l’emploi particulièrement pour les travailleurs informels. Je pense que la souffrance que ressentent de nombreux Sud-Africains va de pair avec les dysfonctionnements du parti de la majorité l’ANC. Il y a une sorte de rupture sociale, qui s’accompagne d’une rupture politique,explique-t-il. Selon le chercheur, «les protestations pour la libération de Jacob Zuma sont donc devenues une opportunité pour les pilleurs, ce qui leur a permis d’attaquer les commerces, notamment les grandes surfaces présentent dans les townships. Les prochaines 48 heures vont être décisives pour le pays, le gouvernement va devoir reprendre le contrôle des rues et il a très peu de temps pour le faire avant que les émeutes ne gagnent le reste du pays. C’est un test pour la police, pour le gouvernement et bien sûr pour le président Cyril Ramaphosa.»

La Démocratic Alliance, le parti d’opposition à l’ANC au pouvoir, a annoncé qu’il allait intenter des poursuites judiciaires contre plusieurs membres de la famille Zuma, estimant qu’ils «attisent les flammes sur les réseaux sociaux en toute impunité».

D’un point de vue économique, dans un pays déjà en difficulté, le rand a chuté de 3% depuis le début de la semaine, la monnaie est à son niveau le plus faible depuis début avril.

En province, des barrages filtrants pour protéger les villes des pillards

Des tas de sable et de graviers bloquent toutes les routes qui mènent à Kokstad, dans le KwaZulu-Natal. Des hommes en armes filtrent les entrées de cette petite ville. Ils sont mobilisés depuis l’aube. «Ce matin, nous les habitants avons pris la décision de fermer notre ville pour la sauver. On inspecte chaque voiture et on décide si oui ou non ses passagers représentent une menace. Pour l’instant, tout se passe bien», rapporte l’un d’eux à notre correspondant Romain Chanson.

Face au risque de pillages, des groupes d’auto-défense se sont formés par endroits. Les habitants en armes sont parfois plus nombreux que la police. Underberg, nouveau contrôle. Ici les hommes portent les munitions en bandoulière, les fusils ont des lunettes et les plus jeunes serrent des battes de baseball. Hier soir, une partie de la ville a été attaquée.

«Plusieurs magasins ont été pillés et certains incendiés. Vous avez le commerce d’alcool là-bas, et le magasin de vêtements. Nous savons qu’un autre groupe de pilleurs est attendu pour aujourd’hui, cet après-midi ou ce soir. Les gens en ont marre de tout ça, peu importe d’où ils viennent, qui ils sont, on doit veiller sur eux. C’est leur propriété privée et ce sont leurs biens qui ont été incendiés ou volés.»

Underberg est la dernière ville à tenir debout, nous lance un homme en armes. Quelques kilomètres plus loin, nous croisons des jeunes garçons avec des sacs de supermarchés le long de la route. La ville suivante a été pillée.

RFI


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