A mon tour de parler ! (Par Khalil KABA)

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Je suis un enfant des victimes du 4 et 5 juillet 1985. Mon oncle, le chef de bataillon Abdourahamane KABA, ancien Ministre des transports et préfet de Gueckedou au moment de son arrestation, a été ligoté tout le long du trajet de la forêt à Conakry dans une jeep avant d’être passé, paralyser de tous ses membres, au poteau en compagnie de 200 autres officiers et sous officiers de son ethnie par Lansana Conté et ses compagnons. Mais je n’en avais jamais parlé jusqu’aujourd’hui au nom de la paix et du vivre ensemble. Jamais dans mes écrits, commentaires et réflexions, je n’ai traité l’homme du 3 avril 1984 de sanguinaire. Je n’appartiens à aucune association de victime et ne demande aucun procès contre le CMRN.

Au contraire, j’ai toujours mis en avant son image de promoteur de LIBERTÉ, de pacificateur, de bâtisseur et d’unificateur malgré sa phrase assassine « Wofatara » lancée contre l’ethnie de Diarra Traoré. En tant que croyant j’estime que Dieu est le meilleur juge. Comme l’a si bien dit le doyen Facely Deux Mara, je suis de la catégorie des fatalistes dans la hiérarchisation des victimes de violence d’État. Je ne connais aucun guinéen, qui de près ou loin n’a pas été victime d’un régime en Guinée de 1958 à nos jours. En réalité l’histoire politique de notre pays, bien qu’elle ait connue des périodes fastes, a été faite de violences obéissant à plusieurs raisons connues de tous.

Pour revenir au cas du Camarade Président Sékou TOURÉ, bien qu’il ait été celui qui a permis à la Guinée d’accéder à la souveraineté nationale, force est de reconnaître qu’il y a eu des ratés dans sa gestion du pouvoir. Des victimes et des abus de pouvoir, il n y en a eu. Le camp Boiro restera une tâche noire. Mais faudrait-il résumer le bilan de AST et du PDG à cela ? Je dis non.

L’homme a été ce qu’il fut pour la Guinée et l’Afrique : combattant infatigable et promoteur d’une Guinée, d’une Afrique libre, indépendante et digne. Véritable panafricaniste, l’histoire retient de Sékou Touré l’image d’un africain qui a porté très haut la voix de l’Afrique dans le monde. Après plusieurs années de lectures, de recherches et de recueils de témoignages j’arrive à la conclusion selon laquelle des guinéens au nom d’une certaine raison d’État ont été victimes des guinéens.

Nous sommes tous à la fois bourreaux et victimes. Il est temps de tourner ces pages sombres et difficiles de notre histoire commune. Tous les pays qui ont connu des pires atrocités que nous ont réussi à le faire. Le Rwanda est un exemple qui doit nous inspirer. C’est pourquoi, je sollicite du Président Alpha Condé au nom de la tradition de la continuité de l’Etat d’adresser un pardon national à toutes les victimes de tous les régimes qui ont présidé aux destinées de la Guinée à un moment donné de son histoire. Et d’aller plus loin, en érigeant des stèles servant de lieux de commémoration pour les familles.

Les guinéens ne peuvent continuer à ériger un mur de haine et de méfiance entre eux. Sortons de nos invectives pour bâtir une Guinée paisible, solidaire et réconciliée. C’est un impératif si nous voulons vivre en tant que NATION dans le sens propre du terme.

Khalil KABA

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