Fouta/Les sages à la délégation ministérielle: « Les peulhs ne sont pas des étrangers… »

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Alpha Condé l’avait annoncé la semaine dernière. C’est désormais chose faite. Le chef de l’État guinéen a délégué plusieurs de ses ministres au Fouta-Djallon, pour rencontrer les sages de la région, après les violents heurts entre les partisans du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) et les forces de défense de sécurité qui ont fait cinq morts dans les rangs des opposants au projet de changement constitutionnel et d’importants dégâts matériels.

Cette délégation qui se rend dans les préfectures du Fouta-Djallon est composée des ministres de l’Administration du territoire et de la Décentralisation, Boureima Condé, de l’Hôtellerie et du Tourisme, Thierno Ousmane Diallo, de la Jeunesse et de l’Emploi jeune, Mouctar Diallo, de la Citoyenneté et de l’Unité nationale, Mamadou Taran Diallo, et du Secrétaire général aux Affaires religieuses, Aly Djamal Bangoura. Objectif, nous dit-on, rencontrer les sages afin de trouver une solution sur les différentes crises qui touchent la région du Fouta-Djallon, d’où sont originaires la quasi-totalité des près de 150 manifestants tués par les forces de défense et de sécurité depuis 2011, marquées par les violences meurtrières de janvier dernier.

Mais entre le régime d’Alpha Condé et les Guinéens du Fouta-Djallon, la langue de bois semble être révolue. Aux émissaires du président guinéen, les sages de la région n’ont pas caché leur colère contre les répressions que le régime de Conakry exercent sur leurs fils.

A Mamou, la première étape de la tournée gouvernementale, le porte-parole des sages a transmis le message de ses pairs en des termes limpides. « Tout le monde est préoccupé par la situation qui prévaut en Guinée, mais le Fouta l’est encore plus. Parce que le président de la République a carrément indexé la région du Fouta-Djallon comme étant celle qui ne veut pas aller avec les trois autres » régions du pays, a rappelé ce mardi 4 février Elhadj Kolon Barry, dans des propos rapportés par Guinéematin.com, avant de les inviter à dire la vérité au chef de l’Etat. « Vous êtes des émissaires du chef de l’Etat, pardon dites-lui la vérité. Dites lui la vérité même s’il va vous limoger. Il va peut-être vous limoger quand vous lui aurez dit la vérité, mais après il se rendra compte quand-même que vous lui avez dit la vérité. On dit que le chef peut accumuler des péchés, mais son entourage en accumule beaucoup plus, surtout lorsque ceux qui constituent cet entourage refusent de dire la vérité au chef ».

Après Mamou, Dalaba et Pita, les ministres-missionnaires ont fait cap sur Labé, la capitale du Fouta-Djallon, pour transmettre le message du président de la République, très critiqué pour ses actions répressives envers les Peuls que son régime considère comme ses plus farouches opposants.

Dans son discours, Elhadj Ibrahima Caba Bah, l’un des sages les plus respectés du Foutah-Djallon, a demandé à ses hôtes à ce que cesse le sentiment anti-peul en Guinée. « Nous connaissons les déclarations publiques faîtes par certains membres du gouvernement concernant les Peuls. Il revient au gouvernement de veiller à ce que le sentiment anti-peul soit ôté des esprits des Guinéens. Il y a des gens qui disent que les Peuls ont les pouvoirs économique et culturel, donc par conséquent il ne faut pas qu’ils aient le pouvoir politique. Cela a été dit publiquement et aucun membre du gouvernement n’a réagi [pour condamner ces propos]. Il y a un gouverneur qui est venu ici nous dire qu’à Conakry quand on compte dix maisons de haut standing, les neuf appartiennent à des Peuls. Ce n’est pas parce qu’ils sont des Peuls qu’ils ont des belles maisons, des richesses. C’est parce que Dieu a élargi leurs chances », a-t-il expliqué aux émissaires du président Alpha Condé.

Pour le doyen Caba Bah, les autorités guinéennes doivent mettre fin aux idées selon lesquelles les Peuls sont des étrangers en Guinée. « Il faut que le gouvernement trouve les moyens pour extirper des têtes de ceux qui le pensent que les Peuls sont des étrangers en Guinée. Quand quelqu’un se lève ici pour nous dire que nous, nous sommes des Éthiopiens… Peut être que nos ancêtres sont venus de l’Éthiopie, mais nous, nous sommes des Foulbhès Foutah (Peuls du Fouta-Djallon, NDLR). Il faut qu’on inculque cela à tous les Guinéens et à tous les Africains », a-t-il insisté.

FOUTANEWS

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